Marque déceptive – Par un arrêt du 21 janvier 2014, la Cour de cassation a expressément décidé que « la déceptivité d’une marque s’apprécie au regard des dispositions du code de la propriété intellectuelle et non de celles des articles R. 112-1 et R. 112-7 du Code de la consommation ».
Une marque déceptive, non protégeable, au sens du Code de la propriété intellectuelle, est une marque « de nature à tromper le public, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service » (1).
A titre d’exemple, CHATEAU LE GRAND HOUSTEAU est une marque déceptive sur l’origine du vin dès lors que les parcelles situées sur le lieu que ce toponyme désigne ne représentent qu’un faible pourcentage du vignoble exploité et s’il n’est pas établi que la production de cette parcelle fait l’objet (2).
Dans l’affaire jugée par la Cour de cassation le 21 janvier 2014, la problématique était d’articuler les dispositions précitées du Code de la propriété intellectuelle avec celles de l’article R112-7 du Code de la consommation qui dispose que « l’étiquetage ne doit comporter aucune mention tendant à faire croire que la denrée alimentaire possède des caractéristiques particulières alors que toutes les denrées alimentaires possèdent ces mêmes caractéristiques », ce même code précisant que l’étiquetage inclut les « marques de fabrique ou de commerce » (3).
La société Andros estimait en effet que la marque semi-figurative CONFI’PURE enregistrée au nom de la société Héro était une marque déceptive au sens de l’article L711-3 du Code de la propriété intellectuelle éclairé par la disposition particulière de l’article R112-7 du Code de la consommation. Elle soutenant que le signe CONFI’PUR induisait le public en erreur sur les « qualités des produits similaires au produit qu’il désigne, en présentant comme singulière une caractéristique commune » ; autrement dit, le mot CONFI’PUR laisserait croire que les confitures d’autres marques ne sont pas des confitures naturelles ou sans bactéries.
La Cour de cassation, adoptant la position de la Cour d’appel de Paris, a rejeté cet argument en distinguant les fonctions respectives d’une marque et de l’étiquetage qui ne se confondent pas.
Une marque a pour fonction première de « garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit désigné par la marque, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit de ceux qui ont une autre provenance ». En revanche, l’étiquetage « a pour objet de fournir à l’acheteur et au consommateur des informations sur les caractéristiques du produit concerné ».
S’agissant d’évaluer le caractère déceptif d’une marque, c’est donc au regard du seul Code de la Propriété Intellectuelle que le vocable CONFI’PURE a été jugé comme un néologisme qui, pris dans son ensemble évoque les gelées, confitures et marmelades et qui, associé à un élément figuratif constitué d’une feuille, ne tend pas à souligner la pureté du produit mais présente un caractère arbitraire et que dans ces circonstances le mot « pure » ne sera pas perçu « comme désignant une qualité particulière que les produits concurrents ne posséderaient pas mais comme constituant avec le terme « confi » et l’élément figuratif un terme de fantaisie ».
Anne-Sophie Cantreau
Lexing Droit des marques
(1) CPI, art. L711-3
(2) Cass. com. 12-2-2013 n° 11-28.654 et n° 12-10.185
(3) C. Cons. art. R112-1