Meta balise – L’usage de noms propres dans la « meta balise » du code source de pages web peut-il fonder une action sur l’atteinte à la vie privée et aux données personnelles ? C’est ce que la cour de cassation a eu à examiner …
En l’espère, une personne physique, en conflit avec d’autres personnes sur un projet de publication, avait mis en ligne sur un blog des informations critiques les concernant et introduit leurs noms et prénoms comme « meta balise » dans le code source du site de façon à favoriser le référencement sur les moteurs de recherche et ainsi orienter les internautes vers les pages dudit blog.
Une meta balise (mieux connu sous meta tag) est une balise spéciale située dans l’en-tête d’un document HTML, afin notamment de fournir des informations permettant aux moteurs de recherche d’indexer la page web.
Considérant que leurs données personnelles avaient été utilisées sans leur autorisation, elles ont introduit une action sur le fondement de l’atteinte à la vie privée.
Raisonnant par analogie avec le droit des marques, les demandeurs soutenaient qu’à l’instar de la marque qui sert à désigner un bien ou un service, un nom patronymique permet de désigner une personne et que si « l’utilisation de mauvaise foi d’une marque au sein des balises méta d’un site afin de capter la clientèle fidèle à une marque au bénéfice d’un concurrent était sanctionnée par les tribunaux, l’association systématique d’un nom patronymique à certaines pages d’un site, du fait de la manipulation d’un tiers, afin d’associer systématiquement ces pages, plutôt que d’autres, porte atteinte aux droits de la personnalité ».
La Cour d’appel refusa toute analogie avec le droit de marques et débouta les demandeurs de leur action.
Sur le fondement des articles 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et 9 et 1382 du Code civil, la Cour de cassation, saisie d’un pourvoi à l’encontre de l’arrêt d’appel, confirme la décision rendue par arrêt du 10 septembre 2014, considérant que le choix du nom d’une personne physique comme mot-clé destiné à faciliter le référencement par les moteurs de recherche sur internet des pages (meta balise) qui le supportent n’était pas fautif sauf à ce qu’il soit associé à d’autres données personnelles et que le contenu de la page à laquelle le mot clé est associé revête un caractère répréhensible.
Si, à première lecture, l’attendu de la Cour de cassation apparaît clair, son application pourrait être plus délicate concernant la notion de « caractère répréhensible », dont on ne sait pas si elle induit celle d’infraction pénale. En d’autres termes, le contenu d’un site ne sera-t-il considéré comme répréhensible que si ces éléments tombent sous la qualification d’une infraction pénale préalablement constatée (telle que la diffamation, l’injure notamment) ou si elle doit être appréciée dans un sens large d’un contenu susceptible de porter préjudice à la personne visée.
En fondant leur action sur l’atteinte à la vie privée, les demandeurs ne semblent pas avoir choisi le fondement juridique le plus évident.
Le raisonnement par analogie avec le droit des marques n’est pas aisé, même s’il se comprend au regard de l’objet technique du litige, la notion de meta balise traditionnellement associée à des problématiques de marques. En effet, le principe sous-jacent au droit des marques est la fonction de la marque de garantie de l’identité d’origine et de protection du consommateur, notions parfaitement étrangères aux droits de la personnalité.
De plus, à la différence des droits de la personnalité relevant du domaine de la vie privée, le droit des marques s’inscrit dans le cadre économique de la vie des affaires.
Enfin, il eut été intéressant de connaître la position de la Cour si les demandeurs avaient choisi de se fonder sur la loi Informatique et Libertés, les nom et du prénom étant des données à caractère personnel dont le traitement, sans avertissement préalable, est susceptible de constituer une collecte déloyale.
Virginie Brunot
Marine Delaporte
Lexing Droit Propriété industrielle