La monnaie virtuelle « Bitcoin » a connu une grande montée en puissance en 2013 et son cours n’a cessé de grimper…
Depuis notre article intitulé « Le système Bitcoin : centre d’attention de la Banque Centrale européenne », le Bitcoin a fait parler de lui en raison de la très forte hausse de son cours et de la publication de décisions judiciaires dans le monde à son propos.
La nouveauté de l’année 2013 a essentiellement tenu au fait que de plus en plus de commerçants dans le monde réel acceptent la monnaie virtuelle Bitcoin comme moyen de paiement et, qu’en conséquence, les banques s’y intéressent de manière plus accrue.
Forte hausse du cours. Cette évolution du Bitcoin a été lancée par la très forte augmentation de son cours en avril 2013 puisque ce dernier est passé de 47 dollars en mars 2013 à 230 dollars en avril 2013. Suite à une attaque de déni de service sur le site japonais Mt.Gox, le cours de la monnaie virtuelle Bitcoin a chuté à 76 dollars pour remonter à 160 dollars et atteindre plus de 1000 dollars en décembre 2013.
Si la fluctuation du cours du Bitcoin est l’une de ses caractéristiques, liée à la non régulation de son cours par une quelconque autorité, il n’en reste pas moins que les événements politiques et économiques sont venus soutenir ce phénomène.
On peut en particulier citer trois événements importants qui ont eu une influence sur le cours du Bitcoin :
- l’installation à Vancouver du premier distributeur automatique de monnaie virtuelle Bitcoin ;
- la lettre de Ben Bernanke, président de la Réserve fédérale américaine (Fed) adressée à la commission de la sécurité intérieure dans laquelle ce dernier indique que le Bitcoin pourrait « présenter des promesses de long terme » et pourrait un jour « promouvoir un système de paiement plus rapide, sûr et efficient » ;
- l’attractivité de la monnaie virtuelle en Chine avec la plateforme BTC China, première plateforme mondiale de transactions de Bitcoin, qui s’est vue imposer de nouvelles règles venant des autorités chinoises qui ont interdit les opérations de compensation impliquant des bitcoins aux plateformes de paiements en ligne.
Mise en garde des autorités. Face à cette montée de la monnaie virtuelle Bitcoin, la Banque de France puis l’Autorité bancaire européenne, ont toutes deux publié des recommandations en décembre 2013 à l’attention des consommateurs afin de les mettre en garde contre les dangers de la monnaie virtuelle et en particulier du Bitcoin.
A ce titre, l’Autorité bancaire européenne a mentionné les points suivants :
- le Bitcoin n’est garanti par aucune autorité centrale ;
- le portefeuille virtuel contenant des Bitcoins peut être volé par des hackers ;
- en cas de paiement en Bitcoins, le consommateur ne sera pas protégé par un droit au remboursement en cas de débit incorrect ou non autorisé ;
- le consommateur peut, certes, gagner beaucoup avec l’envolée du cours du Bitcoin mais également tout perdre ;
- le Bitcoin, en raison de l’anonymat de son détenteur, peut être utilisé pour le financement d’activités ou de produits illicites ;
- l’utilisation de la monnaie virtuelle peut conduire à l’application de taxes spécifiques.
Quant à elle, la Banque de France indique qu’à son sens « l’opportunité de développer l’utilisation de la monnaie virtuelle en tant qu’alternative à la monnaie légale et à ses moyens de paiement scripturaux est très limitée et fait face à des risques substantiels qui devraient en limiter significativement l’utilisation ». A ce titre, elle s’aligne sur les points susmentionnés et rappelle que :
- le Bitcoin ne peut être qualifié de monnaie légale au sens du Code monétaire et financier car le Bitcoin peut être refusé en paiement sans que ce refus ne soit sanctionné par les dispositions de l’article R642-3 du Code pénal ;
- le Bitcoin ne peut être qualifié de monnaie électronique au sens du Code monétaire et financier car il n’est pas émis contre la remise de fonds ;
le Bitcoin ne se présente pas comme un support d’investissement ;
le Bitcoin ne peut être converti dans une monnaie ayant cours légal que si d’autres investisseurs souhaitent acquérir des Bitcoins et, ainsi, le système peut s’effondrer si des investisseurs veulent dénouer leurs positions ;
les commerçants ne pourront pas accepter de manière significative les paiements en Bitcoins sans être confronté à de forts risques tels que :- le risque de liquidité ;
- la volatilité du cours du Bitcoin ;
- l’absence de sécurité des coffres forts.
Activité de conversion du Bitcoin et qualification de prestataire de service de paiement. Si le Bitcoin ne semble être soumis à aucune législation, la Banque de France souligne que tel n’est pas le cas s’agissant de l’activité de conversion du Bitcoin en monnaie ayant cours légal.
En effet, cette activité s’analyse bien comme un service de paiement au sens du Code monétaire et financier car l’opération de conversion nécessite réception, virement et tenue de comptes de fonds.
Par conséquent, l’acteur menant une telle activité devrait, de fait, être agréé en tant que prestataire de service de paiement, en application de la directive service de paiement et l’article L.521-2 du Code monétaire et financier.
Cette interprétation a été celle du tribunal de commerce de Créteil qui a conclu à l’obligation de se faire agréer en tant que prestataire de service de paiement.
Au-delà de nos frontières, cette même analyse nécessitant pour l’acteur concerné d’être agréé a été retenue par le Financial Crimes Enforcement Network (FinCEN) aux Etats-Unis en mars 2013. Ainsi, le site japonais Mt.Gox a obtenu un agrément américain pour continuer à proposer une activité de transfert de fonds.
Le fait d’être agréé en tant que prestataire de service de paiement a pour conséquence de redonner la main aux autorités de contrôle concernant la surveillance des règles de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.
Fiscalité. S’agissant de la fiscalité applicable aux opérations de conversion et de la plus-value réalisable, le Ministère des Finances allemand a annoncé en août 2013 que le Bitcoin, en tant que « monnaie digitale » pouvant être apparentée à de « l’argent privé utilisé dans des cercles d’échanges multilatéraux », est doté d’un statut légitime qui le soumet aux règles de la fiscalité.
En ce sens, il a été décidé que les plus-values de la vente des Bitcoins seraient taxées à 25 % et que les entreprises devront intégrer un taux de TVA dans toutes leurs transactions en monnaie virtuelle Bitcoin.
Ainsi, une législation applicable aux opérations de conversion du Bitcoin en monnaie ayant cours légal semble s’imposer. En ce sens, la révision de la directive sur les services de paiement pourrait venir sceller ce point.
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