L’identification du régime applicable au nano produits de santé est un préalable indispensable à leur mise sur le marché. Or, il n’existe pas de régime juridique spécifique aux nano produits de santé et plus généralement aux nanomatériaux.
Les nanoparticules sont au cœur de traitements révolutionnaires grâce à leur utilisation combinée avec celle des nouvelles technologies. La France compte déjà 230 produits de santé constitués d’éléments « nano » (nano produits de santé) en 2014 dont 49 produits ayant une autorisation de mise sur le marché et 122 médicaments en développement clinique (1).
Au premier rang médiatique des nano produits de santé figure un comprimé aux fins de diagnostic médical, composé de nanoparticules (jusqu’à 2000 fois plus petites qu’une cellule) permettant de mesurer les modifications biochimiques du sang révélatrices d’une tumeur et de se fixer sur les cellules cancéreuses.
De nombreux autres projets sont en cours : un procédé proche de la dialyse dont l’objet est de nettoyer le sang au moyen de billes magnétiques d’un millimètre de diamètre, un vaisseau à explorer le corps humain mesurant 70 nanomètres de diamètre pour délivrer des traitements ciblés, ou encore une « nanocolle » pour cicatriser des plaies et tissus en quelques secondes.
Les nano produits de santé utilisant des nanomatériaux ou nanoparticules sont susceptibles de revêtir une qualification unique ou duale : dispositif médical, médicament, ou les deux. Ils sont qualifiés de médicaments en tant que « substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines (…) pouvant être utilisée chez l’homme (…) en vue d’établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier leurs fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique » (2).
Cette qualification emporte assujettissement au régime d’autorisation de mise sur le marché (AMM), à défaut de régime spécifique aux « nano-médicaments » ou médicaments nano-particulaires (MNP).
Ces produits de santé peuvent être incorporés dans – ou constituer- des dispositifs médicaux (DM) en tant qu’ « instruments, appareils, équipements ou encore logiciels destinés, par leur fabricants, à être utilisés chez l’homme à des fins médicales » (3). Leur régime dépend alors de leur classification, qui s’opère au cas par cas en fonction des fonctionnalités du dispositif.
Au sujet des nanomatériaux, dès 2011, l’Afssaps relevait : « un glissement des frontières entre les médicaments et les dispositifs médicaux. La frontière devient de plus en plus ténue, avec notamment les nanoparticules dans le traitement des cancers ou les dispositifs implantables de suivi de la glycémie. La classification n’est plus forcément évidente et requiert un examen approfondi du mode d’action précis (principal ou accessoire) » (4).
Les directives relatives aux DM vont faire l’objet d’une révision par règlement européen, actuellement en cours d’élaboration, pour une application en 2017.
La proposition actuelle anticipe sur les risques associés à la nanométrie en prévoyant que les DM incorporant un nanomatériau ou constitués feront partie de la classe III, à l’exception des dispositifs encapsulés ou liés de telle manière qu’ils ne peuvent être libérés dans le corps du patient ou de l’utilisateur lorsqu’ils sont utilisés conformément à leur destination. La France prévoit, depuis 2012, une déclaration obligatoire annuelle des substances à l’état nanoparticulaire (5).
Le marché des nano produits de santé devrait atteindre 129 milliards de dollars dans le monde en 2016 et une croissance annuel de 14 %.
Marguerite Brac de La Perrière
Benjamin-Victor Labyod
Lexing Droit Santé numérique
(1) Etude du comité Biotechnologies du Leem « Applications des nanotechnologies à la médecine : compétitivité et attractivité de la France à l’horizon 2025 ».
(2) Art. L.5111-1 du Code de la santé publique.
(3) Art. L.5211-1 du Code de la santé publique.
(4) Rapport scientifique de l’Afssaps « évaluation scientifique des dispositifs médicaux contenant des nanomatériaux » du 22-2-2011.
(5) Décret 2012-232 du 17-2-2012 et Arrêté du 6-6-2012 publié au JORF n°0185.