Le prestataire qui est soumis à une obligation de moyens doit apporter la preuve des efforts qu’il a produits.
L’obligation de moyens, cause de la résiliation du contrat
Résiliation judiciaire d’un contrat à tacite reconduction…
Le prestataire soumis à une obligation de moyens doit apporter la preuve de ses efforts. C’est la position retenue par le Tribunal de commerce de Paris dans son jugement du 14 septembre 2016.
En l’espèce, une société a conclu un contrat de référencement auprès d’un prestataire en avril 2014. L’objectif était d’améliorer la position de son site sur les moteurs de recherche en contrepartie d’un forfait annuel. Ce contrat était d’une durée de 12 mois, renouvelable par tacite reconduction, sauf dénonciation contraire préalable. En l’absence de dénonciation, le contrat a ainsi été reconduit en avril 2015, dans les mêmes conditions, notamment financières.
En raison des impayés du client, le prestataire lui a fait parvenir une mise en demeure. Celle-ci avait pour objet d’enjoindre au client de procéder au paiement du solde de la première année et du total de la seconde année. Cependant, cette démarche n’a pas eu l’effet escompté. Le prestataire a alors décidé de porter l’affaire devant le Tribunal de commerce de Paris.
Dans sa décision du 14 septembre 2016, le tribunal a prononcé la résiliation du contrat et ordonné le remboursement des sommes engagées. Les juges ont en effet considéré que même si le prestataire n’était tenu qu’à une obligation de moyens dans l’exécution de ses prestations, il ressort des faits rapportés par le client qu’il a manqué de diligence dans les moyens utilisés pour atteindre l’objectif fixé.
… pour non-respect d’une obligation de moyens d’un contrat de référencement
Le présent jugement est à rapprocher d’un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 13 mai 2016 (1), déjà commenté (2).
Il s’agit également d’une condamnation du même prestataire pour des faits analogues. La différence réside dans la typologie de l’obligation à laquelle le prestataire était soumis.
En effet, dans l’arrêt d’appel de mai 2016, le prestataire s’était engagé à améliorer le référencement du prestataire en tant qu’obligation de résultat. Le résultat n’ayant pas été atteint, il avait sans surprise engagé sa responsabilité.
Or, prenant certainement conscience de la portée de l’obligation de résultat en droit français, le prestataire a décidé de modifier ses conditions générales. Il a alors plutôt cherché à se placer dans le cadre d’une obligation de moyens. (3)
Il est vrai que la responsabilité du débiteur d’une obligation de résultat est susceptible d’être engagée pour tout écart par rapport au résultat prévu contractuellement. A contrario, le débiteur d’une obligation de moyens pourra arguer des efforts mis en œuvre pour parvenir au résultat, même si ce dernier n’a jamais été atteint. Les juges vont ainsi apprécier la diligence dont a fait preuve le prestataire.
En l’espèce, les éléments suivants ont permis au juge d’apprécier les efforts du prestataire :
- après 5 mois d’exécution contractuelle, sur les 44 mots clés communiqués par le client, seuls 9 avaient été référencés sur Google ;
- au final, les rapports de positionnement censés être envoyés tous les 15 jours étaient plutôt envoyés à rythme mensuel ;
- d’une manière générale, le prestataire ne parvient pas à rapporter la preuve de ses actions. Le prestataire se contente ainsi d’arguer que ses travaux sont « invisibles pour le visiteur » car ils optimisent le site au niveau du code source.
Aussi, les magistrats ont pu considérer que le prestataire avait manqué à son obligation de moyens. Une telle position n’est pas surprenante, les éléments listés démontrent une certaine légèreté du prestataire dans la conduite du contrat.
Par conséquent, il ressort de ce jugement que même si l’obligation de moyens est par principe moins contraignante que l’obligation de résultat, le débiteur de l’obligation doit pouvoir se ménager la preuve de la bonne exécution de ses obligations.
Par ailleurs, les magistrats ont donné raison au client de ne pas avoir payé l’échéance de la nouvelle période contractuelle alors même que le contrat de référencement n’avait pas été réalisé formellement.
En effet, ils ont considéré que les griefs exprimés par le client valaient résiliation.
Ce faisant, les juges sanctionnent les prestataires cherchant à recouvrer les annuités annuelles sans même apporter satisfaction dans l’exécution du contrat.
Marie-Adélaïde de Montlivault-Jacquot
Thomas Noël
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(1) CA Paris, pôle 5 ch.11, arrêt du 13-5-2016, Sté Maquinay c/ Sté Mapaye.
(2) Marie-Adélaïde de Montlivault-Jacquot, Post du 7-7-2016.
(3) C. civ., art. 1301-1.