Ordinateur prééquipé – La vente d’ordinateurs pré-équipés de logiciels d’exploitation ne constitue pas une pratique déloyale au sens de l’article L.122-1 du Code de la consommation dès lors que le consommateur a la possibilité d’acquérir, sur un site internet lié, le même ordinateur « nu », autrement dit sans logiciels d’exploitation préinstallés.
La Cour d’appel de Paris estime que la vente d’ordinateurs pré-équipés de logiciels d’exploitation n’est pas une pratique déloyale au sens de l’article L.122-1 du Code de la consommation (1).
Une association de consommateur a assigné une société devant le Tribunal de grande instance de Nanterre pour qu’elle cesse de vendre en ligne des ordinateurs pré-équipés de logiciels d’exploitation sans offrir aux consommateurs la possibilité de renoncer à ces logiciels moyennant déduction du prix des licences d’utilisation et sans indiquer le prix des logiciels d’exploitation préinstallés. Le tribunal a estimé que la vente d’ordinateurs préinstallés ne revêt pas un caractère déloyal.
En mai 2011, la Cour d’appel de Versailles infirme ce jugement au motif que la vente, sur le site de la société ouvert aux particuliers, d’ordinateurs pré-équipés sans mention du prix des logiciels d’exploitation préinstallés et sans possibilité d’y renoncer était déloyale. La société s’est pourvue en cassation (2).
En juillet 2012, la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel considérant que la vente d’ordinateurs pré-équipés n’est pas une pratique déloyale au sens de l’article L.122-1 du Code de la consommation car le consommateur peut, en s’orientant sur le site dédié aux professionnels, trouver les mêmes ordinateurs sans logiciels d’exploitation pré équipés ; ce qu’après renvoi, la Cour d’appel de Paris confirme.
Cet arrêt est dans la droite ligne de la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes (3).
Dans l’espèce ayant donné lieu à l’arrêt commenté, la Cour de cassation prend soin de relever que le consommateur particulier qui souhaite acheter un ordinateur « nu » le peut effectivement. En effet, il est possible pour ce consommateur particulier, en faisant différents choix sur le site du vendeur, d’accéder à la rubrique » PC professionnels HP sous linux et FreeDOS » tout en ayant la possibilité de continuer à bénéficier des dispositions légales de protection des consommateurs.
Le fait que le consommateur ne se trouvait pas dans l’impossibilité d’acquérir un ordinateur » nu » et qu’il pouvait y accéder sans difficultés particulières tout en continuant à bénéficier de la protection légale des consommateurs constituent les arguments principaux de la décision de la Cour. En conséquence dans une autre espèce, si les conditions n’étaient pas respectées, la vente d’ordinateurs pré-équipés pourrait constituer une pratique commerciale déloyale.
Par cette décision, la Cour d’appel de Paris ne fait que confirmer l’arrêt de cassation du 5 février 2014 (4). Toutefois, en reconnaissant que l’installation d’un système d’exploitation libre reste, pour un consommateur, une démarche délicate dont le constructeur ne pourrait garantir la réussite, la Cour estime que l’intérêt du consommateur consiste à exclure toute qualification de pratique commerciale déloyale et ainsi, autoriser la vente d’ordinateurs pré-équipés.
Si les compétences informatiques du consommateur venaient à évoluer, la jurisprudence pourrait également s’adapter
En attendant, avant d’entamer une action judiciaire sur le fondement de l’article L.122-1 du Code de la consommation, il convient de se ménager la preuve de l’impossibilité pour le consommateur de commander, auprès du même fournisseur, le même ordinateur « nu ».
Marie-Adélaïde de Montlivault-Jacquot
Alexandra Massaux
Lexing Contentieux informatique
(1) CA Paris, pôle 5, ch.5., 5-6-2014, n°12/19175.
(2) Isabelle Pottier, Post du 10-5-2011.
(3) CJCE, 1re ch., 23-4-2009, affaires jointes C-261/07 et C-299/07.
(4) Cass. civ. 5-2-2014.