Des arrêts récents de la Cour européenne des droits de l’homme (1) viennent de confirmer la condamnation de deux sociétés d’édition pour publicité illicite en faveur du tabac. La publicité en faveur du tabac est, par principe, interdite, qu’elle soit directe ou indirecte. Elle n’est autorisée par exception que dans certaines conditions très strictes (2). Parmi ces exceptions, figure l’autorisation des chaînes de télévision de retransmettre en direct les compétitions de sport mécanique qui se déroulent dans des pays où la publicité pour le tabac est autorisée, sans avoir à masquer les logos et marques de cigarettes.
En l’espèce, deux sociétés d’édition étaient poursuivies pour avoir publié dans la presse écrite des photographies d’un célèbre coureur automobile arborant les couleurs et logos d’une marque de cigarettes. Elles avaient été condamnées par les juridictions françaises sur le fondement de la publicité indirecte (3) illicite en faveur du tabac. Ces sociétés avaient alors saisi la Cour européenne des droits de l’homme, considérant que l’interdiction de la publicité en faveur du tabac était contraire à la liberté d’expression garantie par l’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Elles arguaient également de ce que l’autorisation des chaînes de télévision de retransmettre les compétitions de sport automobile, sans avoir à cacher les marques de cigarettes disposées sur les automobiles, les combinaisons des pilotes ou le circuit, était constitutive de discrimination au sens de l’article 14 de la Convention susvisée, dans la mesure où la presse écrite ne dispose pas d’une autorisation similaire.
Dans ces arrêts, la Cour rappelle, tout d’abord, que, compte tenu de l’importance de l’objectif de protection de la santé publique, de la nécessité de lutter contre le fléau du tabagisme et de l’existence d’un consensus européen sur la question de l’interdiction de la publicité en faveur du tabac, les restrictions apportées, en l’espèce, à la liberté d’expression par la loi française répondent à un besoin social impérieux et ne sont pas disproportionnées au but légitime poursuivi. Elle ajoute enfin que si les moyens techniques ne permettent pas aux médias audiovisuels de masquer les marques de cigarettes lors de la retransmission, en direct, de compétitions automobiles, les médias de la presse écrite disposent, au contraire, du temps et des facilitées techniques nécessaires pour modifier l’image et rendre flous les logos rappelant des produits du tabac. Elle considère donc que la discrimination n’est pas constituée, dans la mesure où la presse audiovisuelle et la presse écrite ne se trouvent pas dans des situations semblables. La Cour considère donc qu’il n’y a pas de violation de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
(1) CEDH 5-3-2009 n° 13353/05 ; CEDH 5-3-2009 n° 26935/05
(2) CSP, Art. L. 3511-1 et s.
(3) CSP, Art. L. 3511-4 : « Est considérée comme propagande ou publicité indirecte, la propagande ou la publicité en faveur d’un organisme, d’un service, d’une activité, d’un produit ou d’un article autre que le tabac, un produit du tabac ou un ingrédient défini au deuxième alinéa de l’article L. 3511-1 lorsque, par son graphisme, sa présentation, l’utilisation d’une marque, d’un emblème publicitaire ou un autre signe distinctif, elle rappelle le tabac, un produit du tabac ou un ingrédient défini au deuxième alinéa de l’article L. 3511-1 ».