La présente espèce a trait à l’invocation des règles issues de la Convention de Rome sur la vente internationale de marchandises relatives au défaut de conformité d’une chose.
A l’origine de l’affaire, un contrat de vente portant sur des biens périssables avait été signé entre un vendeur danois et un acheteur français.
Plus de deux mois après la dernière livraison, l’acheteur s’était plaint du défaut de conformité de la chose à la commande et s’était refusé à régler l’intégralité du prix convenu. Le vendeur l’avait alors assigné en paiement du prix et avait obtenu gain de cause en appel.
Le pourvoi formé par l’acheteur critiquait l’arrêt d’appel qui aurait dû, selon lui, rechercher si le vendeur n’était pas nécessairement informé, en sa qualité de producteur, des caractéristiques des marchandises et n’était pas nécessairement conscient qu’elles ne pouvaient convenir pour l’usage auquel elles étaient destinées en application de l’article 40 de la Convention de Vienne.
Le pourvoi est rejeté. La Cour de cassation confirme la décision d’appel qui, après avoir constaté que le vendeur s’était déplacé afin de constater les problèmes survenus avec la dernière livraison et qu’il avait accordé une remise commerciale à l’acheteur, avait retenu que l’acheteur ne rapportait pas la preuve que le vendeur, fût-il producteur des marchandises litigieuses, connaissait ou ne pouvait ignorer, au sens de l’article 40 de la Convention de Vienne, les faits sur lesquels portaient les défauts de conformité et s’était abstenu de les lui révéler.
Le présent arrêt apporte un éclairage important sur l’application des dispositions de la Convention de Vienne dans le cadre d’un contrat de vente internationale de marchandises, qui s’applique aux seuls contrats de vente. Ainsi, lorsque les parties à un contrat de vente ont leur établissement principal dans un Etat signataire de la Convention, et en l’absence d’exclusion expresse de celle-ci dans le contrat , elles seront automatiquement soumises à la Convention qui s’appliquera d’office , au détriment du droit français.
Or, le droit français prévoit que la présomption du défaut de conformité de la chose au jour de l’acquisition joue si le défaut apparaît dans un délai de 6 mois à compter du jour de l’acquisition. Passé ce délai, l’acheteur devra prouver que le défaut existait au jour de l’achat. En revanche, la Convention de Vienne précise que l’acheteur a la possibilité de dénoncer le défaut de conformité dans un délai raisonnable suivant la découverte ou le jour où il aurait dû le découvrir à défaut de quoi il sera déchu de son droit d’agir , sauf à ce qu’il prouve que le vendeur avait connaissance ou ne pouvait ignorer le défaut de conformité.
Depuis le fameux arrêt Oracle du 3 juillet 2012 de la CJUE, qui a qualifié le contrat accordant une licence perpétuelle à des utilisateurs de progiciels d’occasion, de « vente d’exemplaire » (alors que les éditeurs qualifient en général ces contrats de contrat de service puisque seul un droit d’utilisation est accordé et qu’il n’y a pas de remise matérielle d’une chose), il existe un risque que la Convention de Vienne, et les dispositions sur la conformité, plus particulièrement, s’applique à ces contrats. Beaucoup d’éditeurs, afin d’anticiper ce risque de requalification en contrat de vente, prévoient expressément dans leur contrat de service, l’exclusion de la Convention de Vienne. Cette précaution semble avoir vocation à se généraliser.
Marie-Adélaïde de Montlivault-Jacquot
Laure Lalot
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