Le projet de loi relatif au renseignement, examiné en procédure accélérée à l’Assemblée nationale en séance publique à partir du 13 avril 2015 (1), comporte d’autres dispositions que celles qui ont été abordées dans de précédents articles.
I. L’obligation faite aux opérateurs de communications électroniques
L’obligation déjà à la charge des opérateurs de communications électroniques et des prestataires de services en matière de déchiffrement de données ou de transmission d’information et de documents pour préparer des interceptions de sécurité est adaptée par le projet de loi relatif au renseignement.
Les opérateurs et les prestataires de services devront être en mesure de respecter les dispositions relatives au secret de la défense nationale.
Les pouvoirs d’investigation de la CNCTR sont renforcés. Les membres et les agents de la CNCTR pourront pénétrer aux fins de contrôle, dans les locaux des opérateurs et des prestataires de service (2).
II. La protection de l’identité des agents
La protection de l’anonymat des agents des services spécialisés de renseignement est renforcée par le projet de loi relatif au renseignement.
Certains actes réglementaires et individuels concernant l’organisation, la gestion et le fonctionnement de ces services sont opposables, bien que non publiés, après enregistrement dans un recueil spécial tenu par le Premier ministre.
En effet le projet d’article L.861-4 du code de la sécurité intérieure prévoit :
- une publication aménagée des actes individuels des agents devant faire l’objet d’une publication, à un recueil spécial tenu par le SGDSN, Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale ;
- une signature par numéro d’identification de leur auteur attribué avec la délégation de signature, se substituant aux mentions des noms, prénoms et qualité.
III. L’exercice d’un droit de communication au profit de Tracfin
La modification de l’article L.561-26 du code monétaire et financier. Tracfin est un service de renseignement rattaché aux ministères financiers. Il lutte contre les circuits financiers clandestins, le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Ces services est chargé de recueillir, analyser et enrichir les déclarations de soupçons que les professionnels sont tenus par la loi de lui déclarer.
Afin de remplir sa mission de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, Tracfin dispose de pouvoirs encadrés par la loi et bénéficie d’un droit de communication(3).
L’article L.561-26 du Code monétaire et financier est modifié par le projet de loi pour permettre à Tracfin de recueillir auprès des entreprises de transport ou des opérateurs de voyage et de séjour des données identifiant leurs clients ou concernant les prestations (date, heure, lieu de départ et d’arrivée, bagages et marchandises transportées) qu’ils ont fournies (4).
IV. Etendue de l’excuse pénale pour les actions des agents de l’Etat
L’excuse pénale créée par la loi de programmation militaire du 18 septembre 2013 pour les actions des agents de l’Etat répondant à une attaque informatique est étendue aux agents de services de renseignement lorsqu’ils :
- portent atteinte par des actions intrusives depuis le territoire national à des systèmes d’information situés à l’étranger ;
- pour des motifs d’intérêts public limité.
V. Le renseignement en milieu pénitentiaire
La création de deux articles dans le code de procédure pénale. La surveillance des détenus est précisée par le projet de loi, s’agissant du contrôle des communications téléphoniques et s’agissant du contrôle des équipements informatiques.
Deux projets d’articles sont crées dans le code de procédure pénale :
- l’article 727-2 permettant à l’administration pénitentiaire de disposer des prérogatives nécessaires à la détection, au brouillage, et à l’interruption des correspondances illicites émises ou reçues par voie des communications électroniques ou radioélectriques par une personne détenue (communication téléphoniques, échanges de messages écrits, communications par talkie-walkie) ;
- l’article 727-3 prévoit le cadre dans lequel les ordinateurs des personnes détenues peuvent être contrôlés, y compris en temps réel, pour détecter une éventuelle connexion illicite.
L’avis de la Cnil. Dans son avis du 5 mars 2015, la Cnil estime que la mise en œuvre de mesures de surveillance des matériels introduits de manière frauduleuse dans les établissements pénitentiaires ne soulève pas de difficultés.
Didier Gazagne
Audrey Jouhanet
Lexing Droit Intelligence économique
(1) Voir « Projet de loi sur le renseignement : vers un cadre légal unifié », post du 14-3-2015.
(2) Projet d’article L.871-4 du Code de la sécurité intérieure.
(3) Article L.561-26 du Code monétaire et financier.
(4) Article 9 du projet de loi relative au renseignement.