Bientôt une directive sur la protection du secret d’affaire… La Commission européenne a présenté, le 28 novembre 2013, une proposition de directive « sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites ». L’objectif de cette proposition est d’établir un niveau suffisant et comparable de protection et de recours dans tout le marché intérieur en cas d’appropriation illicite d’un secret d’affaires.
En effet, le détenteur d’un secret d’affaires ne détient pas de droits exclusifs sur les informations couvertes par ce secret :
- l’information n’est pas protégeable par le droit d’auteur et est dite de libre parcours ;
- l’information n’est pas forcément brevetable et la protection par le brevet relève d’une stratégie d’entreprise réfléchie ;
- l’information est une valeur économique immatérielle fondamentale pour l’entreprise.
Par ailleurs, les réglementations nationales existantes offrent un niveau de protection des secrets d’affaires disparate.
En droit français, par exemple, la protection du secret telle qu’elle existe aujourd’hui est faible. En matière civile, seule l’introduction d’une action en concurrence déloyale est envisageable. En matière pénale, seul l’article L.621-1 du Code de la propriété intellectuelle (renvoyant à l’article L. 1227-1 du code du travail) prévoit un délit de violation des secrets de fabrique condamnant tout directeur ou salarié d’une entreprise qui révèle ou tente de révéler un secret de fabrique à deux ans d’emprisonnement et une amende de 30 000 euros. Le législateur français avait déjà senti cette lacune dans l’arsenal législatif, notamment suite aux affaires d’espionnage industriel médiatisées en 2011 et 2012. Pour pallier ce manque de protection du savoir-faire et l’absence de condamnation de l’espionnage industriel, le législateur avait réfléchi à intégrer un délit de « violation du secret des affaires ». Une proposition de loi a été présentée et adoptée par l’Assemblée nationale le 23 janvier 2012. Le texte a été transmis au Sénat le 24 janvier 2012 mais est resté lettre morte.
Ce constat est partagé au niveau de l’Union européenne ; le défaut de protection suffisante des secrets d’affaires met en péril le bon fonctionnement du marché intérieur de l’information et du savoir-faire et réduit les activités innovantes transfrontières ainsi que la compétitivité.
Pour pallier cette insuffisance de protection, le texte de la directive propose une définition commune de la notion de secret d’affaires (cette définition est calquée sur celle des « renseignements non divulgués » qui figure dans l’accord sur les ADPIC) et met en place des moyens permettant aux victimes de l’appropriation illicite d’un secret d’obtenir réparation. Des restrictions à l’utilisation d’un secret d’affaires sont posées et des sanctions sont définies lorsque les savoir-faire ou les informations en question ont été obtenus de manière malhonnête et contre la volonté de leur détenteur.
Cette proposition de directive doit être transmise au Conseil des ministres et au Parlement européen avant d’être adoptée puis transposée en droit interne. En attendant un dispositif légal protecteur et harmonisé, nous ne pouvons que vous recommander de sécuriser vos informations secrètes par des engagements de confidentialité forts et une politique de suivi des informations efficace.
Lexing Alain Bensoussan Avocats
Lexing Droit Propriété intellectuelle
Proposition de directive COM(2013) 813 final du 28-11-2013
AN, TA 826 du 23-1-2012