En 1998, la société Sun Microsystems France conclut avec la société IB Solutions un contrat de revendeur agréé. En 2003, la société IB Solutions s’approvisionne auprès d’un distributeur non agréé. Bien que connaissant les faits la société Sun Microsystems France va renouveler son contrat avec la société IB Solutions avant de lui notifier la résiliation des relations contractuelles.
En première instance, puis en appel, les juges vont donner raison à la société Sun Microsystems France en retenant que l’acquisition de deux serveurs auprès d’un distributeur non agréé constitue un comportement fautif matérialisé par un acte de contrefaçon de la marque SUN du fait de la commercialisation des produits dont la société IB Solutions connaissait la provenance illicite et par un acte de concurrence déloyale auprès de la société Sun Microsystems France.
Par une décision rendue le 14 février 2012, la Chambre commerciale de la Cour de cassation va casser l’arrêt de la Cour d’appel de Paris aux motifs principaux que :
– la résiliation pour inexécution ou mauvaise exécution d’un contrat de prestation ne peut entraîner que la responsabilité contractuelle du contractant fautif à l’exclusion de toute action en responsabilité délictuelle, telle que l’action en concurrence déloyale ;
– les mêmes faits ne peuvent caractériser un acte de concurrence déloyale et un acte de contrefaçon ;
– la conclusion par la société Sun Microsystems France d’un nouveau contrat avec la société IB Solutions pouvait valoir renonciation à se prévaloir du manquement de cette dernière pour justifier la résiliation du contrat ;
– la cour d’appel n’a pas vérifié si la faculté de résiliation sans préavis avait été mise en œuvre de bonne foi.
La position de la haute juridiction s’inscrit dans la continuité d’une jurisprudence qui encadre très strictement la résiliation des contrats de distribution. Aussi est-il établi que seuls des manquements d’un degré de gravité rendant impossible le maintien de la relation contractuelle peuvent justifier sa rupture anticipée.
Dans l’arrêt rendu le 14 février 2012, la Cour cassation ne prend pas directement position sur la gravité de la faute du cocontractant mais sur les circonstances entourant la mise en œuvre de la résiliation pour, in fine, considérer qu’elles étaient critiquables tant dans leur fondement que dans leur mise en œuvre, et ainsi annuler l’arrêt de la cour d’appel.
Cette orientation de la Cour de cassation doit inciter les distributeurs à la plus grande prudence lorsqu’ils mettent en œuvre une résiliation unilatérale d’un contrat de distribution et ainsi s’abstenir de tout comportement qui permettrait de mettre en doute leur bonne foi et cela quand bien même il s’appuierait sur une clause résolutoire.
Reste à savoir si cette solution demeure confiner aux contrats de distributions.