Au regard de la directive services de médias audiovisuels dite « directive SMA » (1) la Cour de justice de l’Union européenne a eu l’occasion, dans un arrêt rendu le 21 octobre 2015 (2), de définir la notion de « service de médias audiovisuels » et de poser des critères permettant l’application uniforme de cette notion par les juridictions des Etats membres.
L’affaire portée devant la CJUE concernait le site internet d’un journal autrichien. Sur ce site internet figurait un lien vers un sous-domaine nommé « Vidéos » comprenant un catalogue d’environ trois cent vidéos. La majorité des vidéos, principalement de courte durée, étaient des bulletins d’informations portant sur des sujets variés ; d’autres vidéos ont été ajoutées par les utilisateurs du site internet.
Le régulateur autrichien des communications, autrement dit l’équivalent du CSA français, avait décidé que la section « Vidéos » de ce site internet était un service de médias audiovisuels ou « SMA ».
La première question posée à la CJUE était de savoir si les contenus vidéos correspondaient à la notion de « programme » au sens de la directive qui les définit comme « un ensemble d’images animées, combinées ou non à du son, constituant un seul élément dans le cadre d’une grille ou d’un catalogue établi par un fournisseur de services de médias et dont la forme et le contenu sont comparables à ceux de la radiodiffusion télévisuelle ».
La CJUE a considéré que la notion de « programme » n’implique aucune condition de durée. Rappelant la finalité de la directive qui est d’éviter que des éditeurs de contenus sur internet fassent concurrence, de manière déloyale, aux services de télévision traditionnels (« services de télévision linéaire »), la CJUE a considéré que les contenus de la section « Vidéos » pouvaient entrés en concurrence avec les services traditionnels de télévision et élargit ainsi la notion de SMA.
La deuxième question portait sur les critères à mettre en œuvre pour déterminer si « l’objet principal » du site web d’un quotidien qui met à disposition des vidéos. En effet, il convient de rappeler qu’une offre de contenus audiovisuels sur un site internet ne peut être considérée comme un service de médias audiovisuels que si les éléments audiovisuels ne sont pas « secondaires » au sens de la directive. La CJUE considère que le fait que l’offre audiovisuelle soit présentée dans « le domaine principal ou dans un sous-domaine de celui-ci ne saurait être déterminant » et pose un nouveau critère permettant de savoir si une offre de contenus audiovisuels pouvait être qualifiée de SMA.
Désormais, la CJUE considère que le critère permettant de décider qu’il s’agit d’un SMA est l’autonomie des contenus audiovisuels proposés « par rapport à ceux des articles de presse écrite de l’éditeur du journal en ligne ». Ainsi, lorsque l’offre de contenus audiovisuels apparaît comme « l’accessoire indissociable de l’activité journalistique de cet éditeur », il ne relève pas du champ d’application de la directive. Dès lors que l’offre audiovisuelle ne présente pas de lien particulier avec les autres contenus du site, il y a lieu de considérer qu’il s’agit d’un service de médias audiovisuels.
Cet arrêt de la CJUE va donc faciliter le travail du CSA dans la qualification de SMA même si la nécessité d’une analyse au cas par cas subsiste. La CJUE manifeste ainsi clairement sa volonté d’une interprétation extensive de la notion de SMA.
Marie Soulez
Clémence Delebarre
Lexing Propriété intellectuelle Contentieux
(1) Directive Services de médias audiovisuels : Directive 2010/13/UE du Parlement européen et du Conseil du 10-3-2010 visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (JOUE L 95 du 15-4-2010, p. 1–24).
(2) CJUE 21-10-2015 Affaire C-347/14 New Media Online GmbH c/ Bundeskommunikationssenat.