L’article 6-I-7 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) est en passe d’être modifié. Cet article prévoit pour l’heure que si les intermédiaires techniques (fournisseur d’accès à internet et hébergeur) ne sont tenus à aucune obligation de surveillance des contenus en ligne, ceux-ci sont néanmoins tenus de concourir à la lutte contre la diffusion de contenus les plus graves au nombre desquels figurent ceux faisant l’apologie des crimes contre l’humanité, incitant à la haine raciale ou de pornographie enfantine.
L’article 17 du projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes adopté par le Sénat le 17 septembre 2013 prévoit de créer de nouveaux cas de la lutte contre la diffusion de contenus les plus graves, l’article 6-1-7 de la LCEN devant être modifié dans les termes suivants :
- « Le troisième alinéa du 7 du I de l’article 6 de la loi n° 2004?575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique est ainsi modifié :
- 1° Après les mots : « haine raciale », sont insérés les mots : « à la haine à l’égard de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation ou identité sexuelle ou de leur handicap » ;
- Les mots : « et huitième » sont remplacés par les mots : « huitième et neuvième » ; La référence : « articles 227-23 » est remplacée par les références : « articles 222-33-3, 227-23 ».
Si l’article 17 du projet de loi est adopté en l’état, en plus des cas d’ores et déjà prévus, les intermédiaires techniques devront également transmettre aux services de police, les discours signalés par les internautes de nature sexistes, homophobes et discriminatoires ainsi que les vidéos de type « happy slapping » ou scènes de harcèlement, infraction définie et réprimée par l’article 222-33-3 du Code pénal.
En pratique, les contenus signalés devront être transmis à la plateforme Pharos, étant précisé que la plateforme prévoit déjà la possibilité de signaler de tels contenus.
Il est vrai que ces nouveaux cas de transmission ne créent pas réellement de nouvelle obligation à la charge des intermédiaires techniques. La question n’est donc pas de mettre en œuvre un nouveau process, mais de comprendre ce que recouvre cette nouvelle catégorie. Un éclaircissement parlementaire sur ces points serait souhaitable.
Une autre question pourrait d’ailleurs se poser ; celle de savoir si le signalement opéré devra, hors notification, avoir pour effet une suppression desdits contenus.
En effet, l’article 6-3 de la LCEN prévoit que les intermédiaires techniques ne peuvent voir leur responsabilité engagée tant qu’ils n’ont pas « effectivement connaissance » d’activité ou d’information illicites ou, si dès qu’ils en ont eu connaissance, ils ont réagi promptement pour retirer de tels contenus ou en ont rendu l’accès impossible.
En toute logique, le signalement portant à la connaissance des prestataires les contenus en cause, une suppression devrait être opérée par ces derniers, avec le risque cependant que leur responsabilité soit engagée en cas de mauvaise qualification du contenu signalé et supprimé à tort…
Reste à nos parlementaires de clarifier ces points d’ombre afin d’épargner à nos prestataires techniques de grandes questions existentielles et de longs moments de solitude.
Alain Bensoussan Avocats
Lexing Droit du numérique
Sénat, PLO n° 214 du 17-9-2013
Sénat, Dossier législatif