Dans une décision du 21 janvier 2015, le Conseil d’Etat a estimé que la loi française ne s’applique pas à un site internet qui, bien qu’accessible depuis la France, ne visait pas le public cible français.
En l’espèce, un dentiste français, inscrit au tableau de l’Ordre des chirurgiens de Paris et au General Dental Council du Royaume-Uni, possède un cabinet dentaire en France et un, en Angleterre.
Il a publié, sur deux sites internet de langue anglaise des messages publicitaires relatifs à son activité en Angleterre.
La Chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des chirurgiens-dentistes a considéré que les sites internet en question étant accessibles depuis le territoire français, la loi française devait s’appliquer aux informations qu’ils contenaient.
Or, en application de l’article R4127-215 du Code de la santé publique, « tous procédés directs ou indirects de publicité » sont interdits aux praticiens dentaires. La Chambre a donc considéré que les messages publicitaires contenus sur les sites du dentiste contrevenaient aux dispositions du Code de la santé publique et a infligé un avertissement au dentiste à titre de sanction.
Le Conseil d’Etat, saisi d’un pourvoi en cassation formé par le dentiste, rejette l’interprétation de la Chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des chirurgiens-dentistes et estime que la publicité faite par le dentiste n’a pas le caractère d’une publicité prohibée au sens du Code de la santé publique.
En effet, il rappelle qu’un procédé publicitaire est prohibé si la publicité concernée :
- est mise à disposition par un praticien, ou du moins sans que ce dernier ne s’y oppose ;
- ne se contente pas de fournir une information objective ;
- vise à promouvoir l’activité dudit praticien auprès de patients éventuels.
En l’espèce, le Conseil d’Etat relève que :
- le praticien poursuivi dispose d’un cabinet en Angleterre ;
- les sites sur lesquels les publicités apparaissent sont rédigés en langue anglaise ;
- qu’il n’est fait mention à aucun moment du cabinet que le praticien possède en France.
Le Conseil d’Etat déduit de ces circonstances que les informations publicitaires contenues sur les sites internet n’étaient pas destinées à un public français et que le seul fait qu’elles soient accessibles depuis la France ne leur confère pas la nature de publicité prohibée au sens du Code de la santé public. La loi française n’a donc pas vocation à s’appliquer aux sites internet concernés.
Pour déterminer si la loi française s’applique à un site internet, le Conseil d’Etat emploie donc la théorie du public cible et non celle de l’accessibilité au site internet.
Céline Avignon
Adélie Thévenot
Lexing Droit Marketing électronique