Sms, mails : votre employeur peut-il vous espionner ? Alain Bensoussan, avocat spécialisé en droit des technologies et protection des données personnelles répondait aux questions de Pierre de Vilno sur Europe 1 midi le 20 février.
Un procès a confronté un salarié à son employeur qui était allé regardé les Sms échangés sur son portable professionnel. La cour de cassation vient de lui donner raison. L’employeur a le droit d’interroger le téléphone professionnel d’un salarié pour regarder les Sms envoyés et reçus sans avoir à demander l’avis du salarié (Cass. com. 10-2-2015, n° 13-14779).
Cette jurisprudence est née d’un litige entre deux entreprises ; celle qui s’estimait lésée a utilisée comme preuve des Sms échangés par des salariés avec leurs téléphones professionnels. La Cour de cassation a considéré ses messages comme des preuves tout à fait recevables car on n’est plus dans le domaine de la vie privée dès lors que l’on utilise du matériel mis à disposition de l’entreprise.
Pour surveiller les messages des employés plusieurs solutions existent. L’employeur peut bien sur vérifier directement en prenant le téléphone professionnel. Mais dans beaucoup d’entreprises, il existe un serveur par lequel transitent tous les Sms et que l’employeur peut consulter dès lors qu’ils ne sont pas signalés en objet comme « personnel » ou « privé ».
Pour Alain Bensoussan, « cette jurisprudence est la suite d’une construction qui a commencé avec l’affaire Nikon et le droit à la vie privée résiduelle des salariés dans l’entreprise. Dans cet arrêt du 2 octobre 2001, la Cour de cassation consacre dans tous les médias, le droit du salarié à avoir une vie privée résiduelle dans l’entreprise. Dans la mesure où cette cette vie privée est clairement identifiée, l’employeur n’a pas le droit d’y avoir accès. En milieu professionnel, tout ne relève pas nécessairement du travail, il peut y avoir des moments privés. Cette vie personnelle peut s’exprimer sans qu’il y ait détournement de l’obligation de loyauté.
Dans un deuxième temps, cette jurisprudence considère que dans la mesure où elle est identifiée, l’employeur n’a pas le droit de contrôler cette vie privée résiduelle, quel que soit le média. La règle qui est posée à l’époque, est que tout est professionnel, sauf ce qui est expressément signalé par le salarié comme étant personnel ou privé. On a continuer à construire ce droit à la vie privée résiduelle avec notamment, une charte organisant cette vie privée au sein de l’entreprise (…) »
Le Journal de Wendy Bouchard sur Europe1, Europe Midi (Ecoutez l’émission du 20 février 2015 : à 57:40)