La Cour de cassation a rendu une décision surprenante en matière de déontologie des chirurgiens-dentistes. En effet, dans un arrêt du 9 juin 2017 (1), elle a considéré que le Code de déontologie des chirurgiens-dentistes, et en particulier les règles de publicité, ne s’applique pas aux structures de soins dentaires salariant des chirurgiens-dentistes.
L’affaire portait sur une publicité que le conseil départemental de l’ordre des chirurgiens-dentistes des Pyrénées-Orientales a estimée en violation avec le Code de déontologie. L’article R.4127-215 du Code de la santé publique interdit en effet tous procédés directs ou indirects de publicité.
Le cadre du Code de déontologie des chirurgiens-dentistes
Or il s’agissait ici d’un centre de soins dentaires ayant le statut d’association et l’article R.4127-201 du Code de la santé publique précise que le Code de déontologie s’applique « à tout chirurgien-dentiste inscrit au tableau de l’ordre, à tout chirurgien-dentiste exécutant un acte professionnel dans les conditions prévues à l’article L.4112-7 ou par une convention internationale, quelle que soit la forme d’exercice de la profession ».
Le texte vise spécifiquement tout chirurgien-dentiste, quelle que soit la forme d’exercice. La personne physique est ainsi soumise au Code de déontologie, mais pas la structure, dotée de la personnalité juridique, susceptible de l’employer.
Cette décision étonne car, c’était l’un des arguments avancés par l’ordre des chirurgiens-dentistes, une personne morale exerçant une activité réglementée par l’intermédiaire de collaborateurs qu’elle rémunère, devrait être tenue de respecter les règles déontologiques applicables aux professionnels qu’elle emploie.
Distinction entre personne physique et personne morale
La Cour a affirmé dans un attendu de principe :
« selon l’article R. 4127-201 du code de la santé publique, les dispositions du code de déontologie des chirurgiens-dentistes s’imposent à tout chirurgien-dentiste inscrit au tableau de l’ordre et à tout chirurgien-dentiste exécutant un acte professionnel dans les conditions prévues à l’article L. 4112-7 ou par une convention internationale, quelle que soit la forme d’exercice de la profession, et s’appliquent également aux étudiants en chirurgie dentaire ; que ces dispositions ne régissent que ces professionnels et ne peuvent être opposées aux personnes morales qui les emploient ; qu’il s’ensuit que ces dispositions ne sont pas applicables à l’association ».
Elle a ainsi fait le choix d’une interprétation littérale des textes, plus favorable aux structures de soins dentaires, qui pourront dès lors librement recourir à la publicité, sans risque de sanction.
Pour parvenir à une solution similaire pour d’autres professionnels de santé, il faudra attendre qu’une nouvelle affaire relative au respect des codes de déontologie par les structures de soins soit portée devant la Cour de cassation ou une intervention du législateur.
Cet arrêt pourrait néanmoins être invoqué dans le cadre d’un éventuel litige auquel serait confrontée une structure de soins, quelle que soit la profession de santé.
Marguerite Brac de La Perrière
Aude Latrive
Lexing Santé numérique
(1) Cass. 1e civ. du 9-6-2017, n° 16-17298.