Le 19 décembre 2018 (1), la Cour de cassation a annulé un arrêt de la Cour d’appel de Lyon dans ayant considéré qu’un système de géolocalisation de salariés, en vue du contrôle du temps de travail de postiers, était licite puisque justifié par le travail à accomplir et proportionné au but recherché.
Un système de géolocalisation de salariés à La Poste
La société Mediapost, filiale du groupe La Poste et qui distribue des publicités ciblées en boite aux lettres, a mis en place le système « Distrio » qui enregistre la localisation des postiers toutes les dix secondes au moyen d’un boîtier mobile qu’ils portent sur eux lors de leur tournée et qu’ils activent eux-mêmes.
Si, selon Mediapost, ce système de géolocalisation de salariés a pour but d’enregistrer et de contrôler le temps de travail des postiers, le syndicat Sud PTT considère que ce système est illicite et assigne ainsi la société Mediapost.
Relevons tout d’abord, même si cette question n’est pas abordée dans l’arrêt commenté, que ce type de litige relève bien de la compétence exclusive du conseil des prud’hommes (Code du travail, art. L.1411-1), lequel connait de tous les litiges qui peuvent s’élever à l’occasion de tout contrat de travail entre l’employeur et ses salariés.
Données personnelles et système de géolocalisation de salariés
Il convient de souligner que le service des plaintes de la Cnil peut également être saisi dès lors que la mise en place d’un système de géolocalisation de salariés contrevient, par exemple, aux dispositions du règlement n°2016/679, dit règlement général sur la protection des données (RGPD).
Dans cet arrêt, la Cour de cassation reproche à la Cour d’appel de Lyon d’avoir considéré licite le système de géolocalisation, «sans caractériser que le système de géolocalisation mis en œuvre par l’employeur était le seul moyen permettant d’assurer le contrôle de la durée du travail de ses salariés».
Cet arrêt est en effet l’occasion pour la Cour de cassation de rappeler les conditions dans lesquelles un employeur peut géolocaliser ses salariés.
Mise en place d’un système de géolocalisation de salariés licite
Selon l’article L.1121-1 du Code du travail, des restrictions ne peuvent être apportées aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives qu’à deux conditions cumulatives :
- elles doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir ;
- elles doivent être proportionnées au but recherché.
La Cour de cassation rappelle également que deux conditions supplémentaires sont nécessaires si l’employeur décide de recourir à un système de géolocalisation qui contrôle de la durée du travail. En effet, pour être licite, ce système de géolocalisation doit être l’unique moyen de contrôle possible. Il convient ainsi de vérifier s’il existe un autre moyen, «fût-il moins efficace que la géolocalisation». Par ailleurs, l’utilisation d’un tel système n’est pas justifiée lorsque le salarié dispose d’une liberté dans l’organisation de son travail.
En considération de ce qui précède, la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt de la Cour d’appel de Lyon.
Virginie Bensoussan-Brulé
Lexing Contentieux numérique
(1) Cass. soc. 19 décembre 2018, n° 17-14631.