Si la France fut un élément moteur en matière de lutte contre les faux avis clients, la voici désormais suivie par l’Union européenne.
La directive européenne pour le renforcement de la protection des consommateurs du 27 novembre 2019 (1) a ainsi pour vocation de renforcer la protection des consommateurs européens en assurant davantage de transparence dans les transactions en ligne.
Dans cette optique, cette nouvelle directive vient compléter le dispositif relatif aux faux avis clients. Ses rédacteurs sont partis du postulat selon lequel les consommateurs se basent de plus en plus sur les avis et recommandations publiés par d’autres clients avant d’arrêter leur choix (2). Il apparaît donc primordial que les professionnels garantissent l’authenticité et la fiabilité de ces avis.
Le rôle précurseur de la France en matière de norme relative à la lutte contre les faux avis clients
La France fut l’un des premiers Etats européens à mettre en place un dispositif de lutte contre le phénomène. En effet, dès juillet 2013, elle a instauré la norme AFNOR devenue « NF ISO 20488 » en septembre 2018.
Cette norme permet aux professionnels d’exposer sur leur site marchand leurs bonnes pratiques en matière de publications d’avis clients. Elle impose à ce titre des exigences en termes de collecte et de modération de ces avis. Il s’agit d’interdire aux professionnels d’acheter des avis, ou de s’engager à publier tous les avis, y compris ceux négatifs.
Les dispositions du code de la consommation
Le code de la consommation contient un certain nombre de dispositions visant à interdire les pratiques commerciales trompeuses ou déloyales. A ce titre, la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016 a introduit des obligations générales d’informations pré contractuelles.
Cette loi a notamment inséré dans le code de la consommation un article L.111-7-2. Il impose aux personnes dont l’activité consiste, à titre principal ou accessoire, à collecter/modérer/diffuser des avis en ligne, de délivrer aux utilisateurs une information loyale, claire et transparente sur les modalités de publication et de traitement desdits avis. Ces personnes doivent également préciser si les avis font ou non l’objet d’un contrôle. Leurs sites marchands doivent en outre permettre un signalement par les consommateurs de tout avis dont l’authenticité leur paraît douteuse. Le non-respect de ces obligations est sanctionné par une peine d’amende, voire par le retrait de l’avis litigieux et le paiement de dommages-intérêts.
Les apports de la nouvelle directive européenne sur le renforcement de la protection des consommateurs face aux faux avis client
Les rédacteurs de la directive ont bien perçu la dimension européenne du problème lié aux faux avis clients (3). Dès lors, principe de subsidiarité oblige (4), l’Union européenne paraît la mieux placée pour se saisir de la question. L’Europe doit tendre vers une meilleure application ainsi qu’une modernisation du droit en matière de protection des consommateurs.
Eu égard au rôle cardinal des avis clients dans la prise de décision des consommateurs, la directive imposent aux professionnels :
- d’indiquer l’existence ou non de processus permettant de garantir l’authenticité des avis publics ;
- si ces processus existent, de préciser la manière dont les informations sont contrôlées (5) ;
- de fournir des informations claires sur la manière dont les avis sont traités ;
En outre, la directive érige en « pratique commerciale déloyale » le fait de tromper les consommateurs en indiquant que les avis ont été soumis par des consommateurs ayant effectivement utilisé le produit, alors qu’aucune mesure raisonnable et proportionnée ne permet de le démontrer (6).
Enfin, elle interdit aux professionnels de publier de faux avis clients, qu’ils proviennent des vendeurs eux-mêmes ou de tiers incités par eux. En outre, la directive prohibe toute manipulation des avis clients ; c’est le cas lorsque les avis négatifs sont occultés (7).
Alexandra Massaux
Lexing Technologies émergentes contentieux
Cyrielle Girard-Berthet
Auditrice de justice de la promotion 2020
École Nationale de la Magistrature
(1) Directive (UE) 2019/2161 du 27 novembre 2019 (…) en ce qui concerne une meilleure application et une modernisation des règles de l’Union en matière de protection des consommateurs, modifiant la Directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur («directive sur les pratiques commerciales déloyales») .
(2) Considérant n°47 de la directive (UE) 2019/2161.
(3) Considérant n°60 de la directive (UE) 2019/2161.
(4) Article 5 TUE
(5) Article 3 de la directive portant modification de l’article 7 de la directive 2005/29/CE – ajout au c) un paragraphe 6
(6) Article 3 de la directive portant modification de l’annexe 1 de la directive 2005/29/CE – art. 26 ter
(7) Idem, art. 26 quater